Portrait de technologue | Fernando Belote, t.r.o.
Pouvez-vous résumer votre parcours professionnel?
Issu d’un parcours artistique combinant arts et sciences, j’ai exploré en profondeur l’impact des rayons cathodiques de Röntgen et l’émergence de l’imagerie par rayons X sur la perception du corps humain, telle qu’elle est représentée dans diverses formes artistiques. Pendant mon master à la Faculté des Beaux-Arts de l’Université de Lisbonne (FBAUL), j’ai étudié cette intersection unique, en analysant ses nombreuses implications.
À la fin de mes études, j’ai choisi de retourner à Montréal avec l’ambition de fusionner technologie et soins de santé, tout en acquérant des compétences pratiques dans ce domaine. Cette quête m’a conduit à m’inscrire au programme de radio-oncologie du Collège Dawson, affilié à l’Université McGill et au CUSM. Parallèlement, j’ai développé une carrière artistique axée sur la photographie, l’art conceptuel et la céramique, utilisant ces médiums pour exprimer des idées profondes et inviter à la réflexion.
En résumé, mon parcours professionnel s’inscrit dans un mélange unique d’exploration académique et de compétences technologiques en radio-oncologie, avec pour objectif de promouvoir une pratique éthique, soigner les patients et continuer à acquérir de nouvelles connaissances.
Qu’est-ce que vous aimez le plus dans votre quotidien de technologue ?
Je trouve une grande satisfaction dans la nature polyvalente de mon travail en tant que technologue. Chaque jour offre une variété de tâches qui demandent une combinaison de compétences pour garantir des soins optimaux aux patients. S’appuyant sur mon expérience en sculpture, j’utilise mon expertise pour créer des éléments essentiels tels que des bolus, des moules Vac-Lok et des découpes cut-out pour les traitements en électrons, illustrant la synergie entre l’art et la technologie dans notre pratique.
De plus, j’ai pu mettre à profit mes connaissances en logiciels de photographie pour participer à des processus de planification et de dosimétrie, soulignant l’adaptabilité des compétences diversifiées dans ce domaine. Mes cours en art-thérapie se sont avérés précieux pour établir une communication efficace avec mes collègues et faire preuve d’empathie envers les patients, en reconnaissant les subtilités de leurs expériences.
Dans cet environnement dynamique, l’apprentissage est constant, et chaque journée offre de nouvelles opportunités de croissance et de perfectionnement. En fin de compte, la combinaison de nos connaissances et de nos compétences se concrétise dans les décisions cruciales que nous prenons, ayant un impact direct sur les résultats des traitements de nos patients en salle de traitement.
Pouvez-vous nous expliquer en détail ce qu’est le moule Vac-Lok ?
Les moules Vac-Lok sont fabriqués à partir de petites billes contenues dans une enveloppe souple. Ils fonctionnent en étant gonflés avec de l’air, ce qui leur permet de mouler la position exacte du patient. Une fois le patient positionné, l’air est graduellement retiré pour stabiliser le moule autour du corps. Cela permet de maintenir une position précise et reproductible pour les traitements. Grâce à mon expérience en sculpture, je peux adapter le Vac-Lok pour qu’il épouse parfaitement la morphologie du patient. Une attention particulière est portée à la symétrie et à l’alignement par rapport aux lignes de repère. Il est également essentiel d’éviter des zones trop volumineuses qui pourraient gêner le mouvement des machines de traitement. Bien que ce procédé soit simple d’utilisation, une connaissance des techniques de moulage permet d’améliorer le confort du patient tout en assurant la qualité du positionnement.
Qu’est-ce que les découpes cut-out pour les traitements électrons ?
Les découpes cut-out sont spécifiques aux traitements par électrons. Le processus commence par un dessin de la zone à traiter, tel qu’indiqué par le médecin. Ce dessin est ensuite transféré sur un isolant rigide, comme le Styrofoam, qui est découpé pour correspondre à la forme souhaitée. Une fois cette étape réalisée, le Styrofoam est placé dans un cadre, et du métal liquide, généralement du Cerrobend, est versé autour pour créer une découpe sur mesure. Après solidification, cette découpe est insérée dans la machine pour définir précisément le champ de radiation et garantir que la zone ciblée est traitée avec exactitude.
Quel est le parcours d’un patient en radio-oncologie (planification, dosimétrie, traitement) ?
Après le diagnostic, le patient est préparé pour un scanner initial permettant de localiser la tumeur. Lors de cette étape, des accessoires d’immobilisation, tels que le Vac-Lok, sont utilisés pour garantir une position stable. Les images obtenues servent ensuite à la planification en dosimétrie.
Le médecin dessine la zone à traiter et les organes à protéger, créant un modèle 3D de la région concernée. À partir de ce modèle, des calculs précis permettent de déterminer les angles et les doses de radiation. Pour un cancer du sein, par exemple, la planification vise à limiter les impacts sur les poumons tout en maximisant l’efficacité du traitement. Ces calculs sont validés par le médecin et le physicien avant l’étape de traitement.
En salle de traitement, des accessoires comme le bolus peuvent être utilisés pour augmenter l’efficacité de la radiation. Ce bolus, ayant une densité similaire à l’eau, est moulé pour éviter les bulles d’air ou une pression excessive, qui pourraient altérer la dose reçue par le patient. Chaque étape demande une grande précision manuelle et technique pour assurer que le traitement soit optimal et conforme à la prescription.
Dans un domaine où la santé du patient peut être en jeu à tout moment lors d’un traitement, quelle est la limite du technologue dans sa prise de décision par rapport à ce que prescrit le médecin ?
La limite est toujours déterminée par le médecin. Le technologue, quant à lui, peut constamment s’améliorer dans les tâches qui lui sont attribuées. Dans certains centres, surtout dans les grandes villes, les technologues doivent travailler avec des contraintes de temps strictes. Ici, nous avons la chance d’avoir plus de temps pour réfléchir aux bénéfices et aux inconvénients des différentes approches. Par exemple, il arrive parfois de repositionner le patient plusieurs fois avec un moule Vac-Lok avant de trouver la position idéale pour le traitement.
Personnellement, je suis perfectionniste et j’essaie de maximiser le temps qui m’est accordé pour optimiser la qualité du positionnement. Mon expérience en sculpture m’aide à porter une attention particulière aux détails, à analyser les positions et à m’assurer que chaque ajustement a un impact positif sur le traitement du patient.
Vous avez mentionné l’importance de la communication : à quel point est-elle essentielle entre le technologue et le patient ?
La communication est cruciale. Mon expérience passée comme photographe m’a appris à donner des indications rapides et claires. En tant que technologue, je dois expliquer chaque étape au patient tout en obtenant son consentement, notamment lorsque je dois ajuster son positionnement. Toutefois, je reste attentif à leur niveau de compréhension, surtout lorsque la majorité des patients ont plus de 60 ans. S’ils ne comprennent pas, cela peut les stresser, affecter leur respiration et compromettre leur position.
Chaque patient étant unique, il faut s’adapter : parler plus fort pour un patient malentendant, aller droit au but avec une personne présentant des troubles cognitifs, ou être particulièrement attentif au consentement et au confort des femmes dans des traitements délicats comme ceux liés au cancer du sein.
Il est également essentiel de prendre en compte les différences culturelles. Par exemple, je fais de mon mieux pour parler la langue première du patient si cela peut l’aider à se sentir à l’aise. J’ai déjà travaillé avec un patient autochtone qui préférait communiquer en anglais plutôt qu’en français, car cela le mettait plus en confiance. Plus un patient est à l’aise, plus il suit les consignes de positionnement.
Il faut donc analyser rapidement chaque situation : est-ce une personne vulnérable ? Appartient-elle à une minorité culturelle ? Vit-elle avec un handicap ? Adopte-t-on un ton protocolaire ou plus décontracté ? Ces adaptations sont au cœur d’une communication efficace.
J’aime m’ajuster à chaque patient, qu’ils préfèrent garder une certaine distance ou qu’ils soient plus ouverts à partager un moment de complicité. Une fois, un patient très stressé a demandé à écouter du rock pendant son traitement. Cela a créé une ambiance unique, mais cela l’a aidé à se détendre et à rester immobile, même si l’énergie de la musique semblait contradictoire avec l’environnement médical.
En somme, la communication et l’adaptabilité sont essentielles pour offrir une expérience optimale aux patients.
Que diriez-vous à quelqu’un qui veut devenir technologue ? Avez-vous des conseils à transmettre ?
À toute personne souhaitant entreprendre une carrière de technologue en radio-oncologie, voici quelques conseils précieux :
Le domaine de la radio-oncologie est riche et diversifié, offrant de nombreuses opportunités professionnelles. Cependant, il exige un haut niveau de responsabilité éthique. Il est crucial d’être attentif à vos propres actions et attitudes, tout en cultivant une conscience de soi. Soyez également ouvert à apprendre de vos collègues, dont l’expérience peut apporter des perspectives inestimables.
Approchez votre travail avec empathie et sensibilité, en particulier lorsque vous accompagnez des patients dans des situations critiques ou vulnérables. Enfin, intégrer et soutenir les individus marginalisés n’est pas seulement bénéfique pour eux : cela contribue à bâtir une société plus inclusive et bienveillante pour tous.
Votre dévouement et votre implication peuvent faire une réelle différence dans le parcours des patients et au sein de la profession.
Merci à Fernando pour sa participation et son témoignage!